Une promesse non tenue
10 Fév 2012

Une promesse non tenue

Tout est noir autour de vous. Vous

10 Fév 2012

Tout est noir autour de vous. Vous entendez les grincements incertains d’un archet malhabile glissant sur les filins désaccordées d’un violon qui semble tout près, puis, tout d’un coup le soleil perce la ligne d’horizon alors qu’au même moment, des notes plus claires parviennent à vos oreilles.

Le paysage, au départ flou et dépourvu de toute caractéristique permettant de vous situer, se précise peu à peu. Vous ne savez pas comment cela est possible, mais vous êtes en Asie et au Moyen-Orient à la fois, dans un désert de sable où rizières, forteresses

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mythiques, dragons et samouraïs côtoient puits de pétrole, palais magnifiques et paysans enturbannés. C’est ce genre de visions oniriques que nous propose Rufus Wainwright au travers de son album Want Two, et ce dès «Agnus Dei» la première chanson du disque. Il y utilise une voix puissante, émotive et extrêmement communicative, qui n’est pas sans rappeler celle de Thom Yorke, le chanteur de Radiohead, pour réciter des mots latins : «Agnus Dei/Qui tollis peccata mundi/Dona nobis pacem» (Agneau de Dieu/Qui enlève les pêchés du monde/Accorde nous la paix) qui ne se manifeste malheureusement plus dans le reste de l’œuvre, où l’on retrouve plutôt une voix traînante et un peu nasillarde, qui n’est pas désagréable à entendre non plus, mais qui ne fait pas ressentir autant d’exaltation à l’auditeur.

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La surprise de la première composition passée, toutefois, les pièces tombent un peu dans la répétition, malgré que certains morceaux se démarquent encore, comme «Little Sister», qui par moments sonne comme une veillée de Noël, ramenant pleins de souvenirs agréables des fêtes de mon enfance, grâce à leurs harmonies vocales ou à l’emploi d’un accordéon, d’altos, de violoncelles, de clarinette ou de basson. C’est d’ailleurs là, dans l’utilisation de divers instruments pour créer des ambiances et des atmosphères aussi variées qu’étonnantes, que se trouve l’intérêt majeur de cet enregistrement. Les autres pièces, sans être mauvaises pour autant, tombent un peu dans la production musicale plus classique ne nous amenant pas toujours vers les nouveaux horizons promis par la première.

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Les textes, quant à eux, m’ont laissé sur ma faim, allant parfois chercher des éléments vraiment géniaux, pertinents et critiques, mais, comme la musique, ne sortant le reste du temps pas assez des sentiers battus. Une impression de déjà vu se dégageait des vers à plusieurs reprises et la répétition de certains mots deux vers de suite laisse le sentiment qu’il manque de contenu Je n’ai pas non plus compris la pertinence, l’intérêt ni le rapport de l’utilisation d’extraits de textes bibliques et d’autres références chrétiennes et catholiques. Malgré le fait que je n’aie pas les oreilles sensibles ou que je ne sois pas provoqué facilement par des mots que l’on qualifie comme sales, j’ai trouvé plutôt incongrus et hors-contexte les moments plus vulgaires où il se laissait aller, entre autres, à parler du sperme d’un Messie homosexuel tout droit sorti d’un porno des années soixante-dix (!?).

rufus wainwright 5Toujours est-il que Rufus Wainwright nous amène en voyage avec lui au travers de certains morceaux, mais nous laisse aussi pourrirchez nous dans d’autres. Le potentiel est là pourtant, on le sent bien et s’il avait été déployé dans toute son ampleur et toute sa splendeur, cet album aurait été un chef d’œuvre monumental. Malheureusement toutefois, l’artiste a manqué soit d’audace, soit d’inspiration, soit d’originalité, ou un curieux mélange des trois, nous laissant ainsi entre les mains une œuvre non aboutie, qui n’est pas sans rappeler un coït interrompu, qui aurait pourtant pu se démarquer de manière excessive si tous les morceaux avaient suivi l’exemple du premier.

 Tracklist : 

1.  Agnus dei

2. The one you love
3. Peach trees
4. Little sister
5. The art teacher

6. Hometown waltz
7. This love affair

8. Gay messiah
9. Memphis skyline
10. Waiting for a dream
11. Crumb by crumb
12. Old whore’s diet (Featuring Antony)
13. Cœur de parisienne – Reprise d’Arletty (Live) (Bonus track)

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