L’art de la morale sans prise de tête
04 Mar 2016

L’art de la morale sans prise de tête

Quand on voit deux artistes talentueux se

04 Mar 2016

Quand on voit deux artistes talentueux se réunir pour un projet commun, ça nous fait toujours plaisir. C’est ici le cas du rappeur Roméo Elvis et du producteur Le Motel, deux étoiles montantes du hip hop belge. Bien qu’ils aient appelé le projet Morale, on voit mal les deux gaillards nous donner des leçons pendant 11 titres. Un titre donc assez paradoxal qui attise la curiosité.

Ce projet suscitait tout de même une certaine attente. Pourquoi ça? Car d’un côté, on a un rappeur de 23 ans, dont on entend de plus en plus parler, qui a une certaine facilité dans ses flows. Il a beaucoup collaboré avec le groupe l’Or du Commun, qu’on retrouvera d’ailleurs sur ce projet. Il sort son premier projet en 2013, Bruxelles c’est devenu la jungle, un EP très prometteur. Dedans, il fait preuve d’un grand sens de l’humour et d’auto-dérision dans ses textes, nous emmenant au passage dans un monde surréaliste au premier abord, mais pas si loin du notre après réflexion. Il gardera toujours cet état d’esprit, que ce soit dans ses différentes collaborations ou dans Famille Nombreuse.

De l’autre côté, on a Le Motel, un producteur brainois de talent. Depuis longtemps dans la production, il a fait son nom grâce à plusieurs collaborations intéressantes. Avec ses amis d’enfance, Yellowstraps, ils ont sorti un LP commun en 2015 intitulé Mellow. Le projet est une vraie réussite, on avait déjà eu un avant-goût de cette association avec les excellents Pollen et Valium, mais ici l’alchimie entre les artistes atteint son paroxysme. Du coup, il n’est pas à son coup d’essai et retente le challenge du projet commun avec une autre anomalie de la musique belge.

Morale

Photo : François Dubois

On s’attaque donc au projet avec un optimisme non caché. L’intro remplit d’entrée parfaitement son rôle, donne le ton de l’album et efface l’idée d’un projet moraliste pour ceux qui y auraient cru. L’Elvis de Bruxelles semble  être bien en forme. Il se balade sur les productions du Motel, bien variées et offrant une musicalité supplémentaire à l’EP, un niveau au-dessus des précédents projets de Roméo Elvis. Tantôt très légères voir swingantes (comme dans Copain ou Assurance), tantôt plus “sombre”, Roméo s’adapte, tant au niveau du flow que des textes. On sait qu’il a toujours eu une écriture particulière et qu’il aime prendre des risques. Il se lance notamment dans un story telling en deux parties avec les titres La voiture et La valise. Toute l’histoire est basée autour d’une fameuse valise, dont le contenu volé était destiné à une transaction. Un fait qui attire bien des ennuis au personnage qu’incarne Roméo Elvis. La mort planant au-dessus de lui, il sombre sous les médicaments. Une histoire très bien narrée, un concept original et un pari gagné.

Dans le titre éponyme Morale, on découvre mieux Elvis, laissant le Roméo de côté. Un texte plus sérieux, s’exprimant sur son parcours, ses craintes, ses rêves. Sobre et poignant, avec une petite outro chantonnée, c’est certainement le morceau phare du projet.

Mais attention, il n’en oublie pas son humour et son côté plus déjanté. Intwodouckcheun est complètement dans cette veine, plus un interlude qu’une chanson, on voit toute sa folie durant ces 2 minutes, on les imagine se taper des barres sur ce genre de délire. Le projet est également parsemé de petits dialogues humoristiques, le plus marquant étant sans nul doute celui avec Yellowstraps, où il oblige même Yvan à chanter en français. Le défi est relevé et très réussi. Pour ce qui est des autres invités, retrouver deux membres de l’or du commun n’est pas vraiment étonnant, mais ça reste de belles collaborations. Le refrain de Swing sur Copain est excellent, et son entente avec Primero n’est plus à refaire, les morceaux sont énergiques et agréables à écouter. Tessa Dixson et Halibab Matador, sont les bonnes surprises apportant une bonne vibe au morceau Poliss Massa.

Après 11 bons titres, le duo nous surprend une dernière fois avec un titre caché après 2013, qui n’est pas sans nous rappeler leur première collaboration sur la chanson Juliette. Une déchéance amoureuse qui est en fait le remake du morceau en question. Voilà qui clôture à merveille ce projet commun. A la fois carré et inventif, varié musicalement, ils ont su confirmer que les attentes autour du projet étaient fondées et y ont répondu avec brio.

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