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L’étape bruxelloise du périple d’Oddisee

All Eyes On Hip Hop, l’association dont le but est de “créer une bonne vibe pour tous les amoureux de la musique Hip-Hop sous tous ses aspects”, a organisé un concert à trois têtes il y a quelques jours au VK*. Nous avons pu assister aux prestations de Grey, Pink Oculus et Oddisee dans la salle du quartier de Molenbeek.

C’est aux alentours de 19h10 qu’une mini foule très éclectique s’est précipitée aux abords de la salle de concert du VK*. Cette foule semble perdue au milieu de nulle part dans le quartier Ribaucourt qui est loin d’être le symbole de diversité. On peut même apercevoir 2 jeunes imberbes, très certainement encore mineurs dans cette petite file. Comme quoi rien n’est encore perdu, ils ne sont pas tous fans de Gradur ou de Kaaris. La musique retentit au loin et la frustration de ne pas pouvoir entrer pour en profiter se fait ressentir dans la foule un peu plus volumineuse. Pas moins d’un quart d’heure plus tard, les portes s’ouvrent enfin et ceux qui semblent être les gérants nous laissent entrer après un détour pour aller chercher de quoi se sustenter au snack d’en face, un durum poulet sans aucun doute. Bref, passons directement au début des hostilités…

Grey

Il est maintenant 20h00 et la salle se remplit très timidement sous le son du DJ chargé de l’ambiance de la soirée. Il faut dire qu’Oddisee est annoncé pour 21h15. Cela n’empêche pas aux 3 jeunes hommes de se poser sur scène: un guitariste, un MC et un DJ. Grey se présente sommairement en anglais avec un accent qui paraît natif. Il ne faut pas se laisser avoir, ce producteur/rappeur/chanteur est bien de chez nous : la région d’Anvers.  Il enchaîne directement et fait résonner son flow dans la salle un peu plus remplie. Et c’est sur Who you are que le guitariste nous offre son premier solo, solo dont nous ne profiterons pas dans son entièreté à cause d’un problème sonore. Ils enchaînent ensuite sur une demi-dizaine de sons qui ne sont pas tous sur les plates-formes du rappeur.

Cet Anversois est un artiste à conseiller vivement à tous les amateurs de Hip Hop new school et aux autres aussi. Il ne faut pas se fier à ses 400 followers sur Soundcloud, comme on le sait tous, la qualité ne fait pas la quantité. Et Grey a très certainement des tonnes de pastilles de qualité à nous refiler. Malgré les quelques problèmes techniques, nous étions contents de voir un instrument de musique sur scène, ce qui fait souvent défaut aux producteurs de musique électronique d’aujourd’hui, surtout quand ils sont en début de carrière. C’est assez brutalement que la partie de Grey se termine, ce qui reflète assez bien sa manière d’échanger avec le public tout au long du concert : brut de décoffrage. Sans que l’on s’en soit réellement rendu compte, le peuple s’est condensé à l’arrière de la salle. On entend maintenant son bruit au-dessus de la musique du premier DJ revenu nous faire patienter. Patienter ? C’est vite dit ! En réalité, il nous a passé 2,3 sons et nous a laissés bredouilles (What’s the point man???). 

Photo: Ton Desmar

Photo: Ton Desar

Nous avons donc attendu 10 minutes de plus avant que l’Hollandaise Pink Oculus débarque en mode attaque, rappant a cappella avec une puissance vocale sans nom. Une fois la musique lancée par ses compagnons de scène, un au synthé et un autre à la batterie – ressemblant fortement à Taboo des Black Eyed Peas au passage – elle se met à chanter et on ne perçoit plus cette puissance dans sa voix. Les instruments ont pris le dessus sur elle, mais elle compense en dansant très énergiquement. Elle paraît même en transe. Elle prend une sorte de maracas et nous fait un son hybride entre de l’Afro et du Grime façon Lady Leshuur. Quand vient la fin du concert, on peut penser qu’elle a un peu trop de manières, ce qui peut être quelque peu agaçant. Mais le fait qu’elle semble possédée et son énergie auront vite fait oublier ce constat très vite. C’est assez impressionnant toutes ces personnes dans un seul corps, surtout si menu.

Pendant sa prestation, un des musiciens de Good Compny, le live band d’Oddisee sort discrètement sa tête pour admirer le public qui l’attend. Il a surement hâte d’être sur scène, faut dire que c’est une véritable boule d’énergie. Il nous le prouvera plus tard derrière son synthé. Vient alors la fin du live de Pink Oculus, le DJ revient pour nous mettre du Action Bronson pendant que le staff monte le matos pour Oddisee et son crew. A cette heure de la soirée, les odeurs de transpiration se font sentir. Qu’à cela ne tienne, Good Compny commence avec un petit son d’intro assez groovy. Puis c’est au tour d’Oddisee d’arriver tranquillement sur scène, en mode «posé avec sa tasse de thé» . 

Il entame Ready to rock, choix assez interpellant étant donné que ce morceau est extrait de l’album People Hear What They See qui date de 2012. Sur la track suivante, le guitariste rencontre un problème technique, il semblerait que sa guitare ne fonctionne plus. Il sort carrément de scène pour demander de l’aide. Ses efforts seront néanmoins vains, impossible de régler le problème. Oddisee tente de noyer le poisson en plaisantant à son sujet : «He is unprofessional» , il se place derrière son micro pour singer son acolyte, il se met même à raconter une anecdote pour faire oublier l’attente. Ils se résolvent finalement à continuer sans la guitare sur The goings on.

Mais le guitariste insiste, il sort de scène une nouvelle fois, sans qu’on ne sache réellement pourquoi cette fois-ci. What’s going on really ? Quand, coup de théâtre, le guitariste de Grey offre son instrument. Après quelques recâblages, Good Compny et Oddisee reprennent sur That’s love, on sent une réelle connexion entre tous ses hommes présents sur scène. Ça suinte d’amour au beau milieu de toute cette testostérone. La cohésion est le maître-mot, Oddisee évoque même leur nouvelle recrue absente: Olivier Saint-Louis aussi connu sous le nom d’Olivier Daysoul. Ils poursuivent en mode marathon sur First choice, Book covers, Contradiction’s Maze et les solos expéditifs des musiciens se multiplient. On a même droit à une petite session beatbox tout en harmonie.

Après ce bombardement de sons, il est difficile d’identifier LE moment fort du concert, ce moment où les esprits convergent, où le MC semble perdre pied dans le flow de ces musiciens. Quoi qu’il en soit, le concert se poursuit sur Own Appeal et se termine en laissant une légère impression de «pas assez» . Il y avait un certain manque de conviction de la part de ces derniers artistes. On croirait qu’ils sont venus simplement pour assurer le minimum syndical. Aucun d’entre eux ne fait d’effort supplémentaire pour chauffer ou rebooster le public. Sauf peut-être le gars derrière le synthé qui, comme à son habitude, danse comme une furie. Les autres semblent essoufflés, un essoufflement surprenant, car The Good Fight Tour a officiellement débuté il y a moins d’un mois. Il est vrai qu’ils étaient présents à Couleur Café, peut-être auraient-ils enchaîné trop de lives, ce qui aurait pompé toute leur énergie ? En tout cas, on leur souhaite bien du courage pour arriver au bout de cette tournée qui s’achèvera en décembre.

BeatChronic presents “Maybe Belgium” #10 : Lee Davon

Nous célébrons encore l’Eté sur de la dance et pensons que Lee Davon est le candidat idéal pour vous assurer des vibes ensoleillées! Adepte du vinyle depuis 1999, fondateur et moitié d’Umlaut, notre invité nous emmène dans un voyage rempli de rythmes hypnotiques, de vocalises séduisantes et de lignes de basses profondes, flirtant constamment entre house et techno. Successivement promoteur, agent et directeur artistique du FUSE de 2003 à 2013, Lee Davon est désormais résident aux soirées concept KULT! et B-EATS.

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BeatChronic presents “Maybe Belgium” #8: Russel Clay

Musicien accompli, Russel Clay nous emmène dans un univers onirique à la fois ténébreux et lumineux. Les sons qu’il compose au moyen d’un appareillage analogique sur mesure vous transporteront entre compositions classiques et techno machinale, avec des influences électroniques tels que le breakcore ou encore l’acid.Russel Clay fait partie de FTRSND, une initiative bruxelloise qui rassemble les producteurs de musique électronique “fait maison”.

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The xx s’offre un ride

Suivant la sortie de l’album In Color, Romy Madley Croft et Jamie XX de The XX offrent un petit making of illustrant leur passion du skateboard clippé pour leur single Loud Places. 

On y découvre le niveau plus que respectable des associés en matière de ride, dans le skatepark privé du House of Vans.

Le texte accompagnant la video est on ne peut plus clair : on a affaire à deux riders confirmés. Capture d’écran 2015-06-08 à 11.10.10

Romy and I grew up skateboarding together. It was such a big part of our friendship, even before we started playing music.We would spend every weekend from early in the morning till late at night, skating and exploring the streets of London. We wanted the video for Loud Places to show us skating and going to the places we used to go to. xx Jamie xx

La video du making of à voir ici.

 

BeatChronic présente “Maybe Belgium” #7: Jazzawesz

Pour ce 7ème voyage musical de la thématique “Maybe Belgium”, nous avons invité “Jazzawesz” de Sint-Niklaas, près d’Anvers. La musique est selon lui le meilleur moyen de se relaxer et lui permet d’explorer pleinement sa créativité dans son domaine favori : la House music. Pour vous présenter le genre, il a préparé un beau cocktail d’artistes belges tels que Pat Lezizmo, Kraanwerk, Khillaudio, Furniture Crew, Lockwood mais également ses propres productions.

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BeatChronic Worldwide Mix #8: LTF (RUSSIA)

D’après les publications récentes de l’Université de Londres, le hip-hop est le genre musical le plus influent à travers le monde depuis le son pop-rock des Beatles. Alors pour illustrer ce phénomène mondial nous avons demandé une mixtape au prodigieux LTF – Light The Fuse – qui nous vient d’Omsk, en Russie; un pays où règne encore une certaine censure de ce qui provient des Etats-Unis, mis à part la musique qui est parvenue à atteindre la jeunesse post-soviétique. Le résultat est stupéfiant ! Laissez vous emporter par le rythme d’une doublebass surplombant magnifiquement un régal de breakbeats, en harmonie avec des samples soulful de l’ère de la Motown, le tout synthétisé sur un appareillage “made in the USSR”.

Suite à la sortie du premier album de celui-ci sur le label français “Black Milk Music” le 26 janvier dernier, nous avons décidé d’inviter LTF à réaliser un mix pour notre série “Worldwide Show”. Ceci constitue une pièce d’histoire peu commune qu’il est nécessaire d’ajouter à sa culture générale. Et ne croyez surtout pas que c’est fini, nous vous réservons une petite surprise avec notre ami LTF très prochainement.

BeatChronic presents “Worldwide Tour” #8 : LTF by Beatchronic on Mixcloud

Tracklist ID:

The Great Revivers – Reaction Psychotique
The East Coast Connection – Summer In The Parks
Charly Antolini – Handicraft
Booker T. & The MG’s – The Horse
Respect – Soul Entertainer
Nina Simone – Funkier Than A Mosquito’s Tweeter
Freddy Hubbard – Red Clay
Roots Manuva – Witness (Walworth Road Rockers Dub)
Paul Nice – Break It Down
Pete Rock & C.L. Smooth – Worldwide (Instrumental)
Kurt Edelhagen Big Band – Suburbia
Arkady Shilkloper, Mikhail Karetnikov – Big Blues
Volkmar Schmidt – Episode
Gustav Brom – U Jazu Pod Mostem
LTF – Can’t Hide It
Dapdown – Dap Payback
AJ – High & Heavy
Dapdown – It’s Gotta Swing
LTF – Sun Shower
The NCY Milky Band – Can’t Be Serious (AJ Remix)
LTF – Groove Habits
The NCY Milky Band – Nuit A La Sante (AJ Remix)
Dapdown – Dapdown Is Dead

Toutes les transitions réalisées par LTF

facebook.com/groovehabits/info?tab=page_info
mixcloud.com/JnksDJ
soundcloud.com/aj1
blackmilkmusic.fr/artists/ltf
sabboy@yandex.ru

Artwork réalisé par Tzar

Le mois de Janvier en musique : Le top 5

Depuis peu, la rédaction de BeatChronic vous fait part de ses plus gros coups de coeur mensuels. Dès ce mois,  le résultat de nos bonnes résolutions pour 2015. A la clé: une vidéo illustrant le “Top 5” mensuel de notre chaîne YouTube. Au gré des mois et des saisons, nous offrons une cure idéale pour tous les bruxellois nostalgiques ou expatriés: quelques HyperLapses permettant de faire revivre notre belle capitale.

On ne doute pas une seconde de plus que votre curiosité vous pousse à lire ces quelques lignes suivantes:

1) Dan Shake – Out Of Sight

Dan Shake, prétendant de taille de la nouvelle scène “house”, il ne nous a dévoilé que peu de titres jusqu’à présent et nous a encore laissé sur notre faim avec le titre “Out Of Sight” sorti sur Black Acre Records. On entendra parler de lui très prochainement sur le célèbre label de Moodymann, Mahogani Records.

2) Phony PPL – Why iii Love The Moon

Le collectif de Brooklyn démontre que le hip-hop est loin d’être mort. Le rassemblement de musiciens et de rappeurs aura marqué ce début d’année avec l’album “Yesterday’s Tomorrow” sorti le 13 janvier, un classique en devenir!

3) Heems – Sometimes

L’ex-membre du groupe indo-américain très décalé Das Racist, Heems nous concocte un projet solo “EAT PRAY THUG” annoncé pour le 10 mars. On s’attend à des surprises lyricales qui rappellent les vapeurs odorantes du curry de Madras.

4) The Age Of L.U.N.A. – Six Feet Deep

Douce voix féminine, phrasé fluide et synthés galactiques, le trio parfait pour s’évader le temps d’une track dans l’univers créé par les 4 chilleurs londoniens.

 5) Joey Bada$$ – Teach Me feat. Kiesza

“B4DA$$”, premier album très attendu du rappeur juvénile de New York “Joey Bada$$” a vu le jour ce 19 janvier et a déjà rencontré un franc succès à travers le monde entier. Ici, un extrait surprenant avec la chanteuse émergente Kiesza. L’album produit majoritairement par Statik Selektah comporte aussi une track produite par le regretté Jay Dee, des associations pleines en couleurs qui vous montreront la voie que prendra le hip-hop.

Son & Mixage: Kreshik

Image & Montage: Jean-Philippe Kets

Black Milk live with Nat Turner @Vk* (Partie 1/2 : le concert)

Bottles to the good life, no more hood life

—— Black Milk, Bounce

 

Detroit, au Michigan, est une super ville ayant produit des merveilles telles que The Temptations, The Supremes, The Stooges, Funkadelic, Milt Jackson, Slim Gaillard, Aretha Franklin, Yusef Lateef, J Dilla, The White Stripes, Eminem et Karriem Riggins.  Malgré le fait que beaucoup d’entres-elles nous aient quitté depuis longtemps, la ville demeure régulièrement féconde en nouveaux talents, comme nous l’avons vu récemment avec l’émergence de numéros tels que Danny Brown (qui se produira à Bruxelles le 28 Février prochain), Clear Soul Forces, ou la renaissance elle-même avec le troisième (ou est-ce le quatrième ?) retour de Slum Village. Il s’agit également de la ville qui a vu naître Curtis Cross, également connu en tant que Black Milk, il y a de cela trente années. Bien que Motor City puisse traverser tous les déboires imaginables, elle peut se reposer sans crainte sur la capacité de ses artistes à la représenter à travers le monde.

 

Dans son album No Poison, No Paradise, Black Milk se lance encore plus profondément dans l’introspection, comme le présageait sans doute Album of the Year, et comme il le montre avec la chanson d’ouverture Interpret Sabotage qui semble décrire des souvenirs de son enfance dans les rues de Detroit. Ville qui, tout comme l’album, est parsemée de conflits. De pilules bleues et de pilules rouges. D’analogue et de digital. De routes qui peuvent être parcourues pour l’éternité, avant d’être préférées à des meilleures, ou à des pires. La couverture de l’album, sombre, inspirée par le style de George Clinton, est parsemée d’illustrations de parties variées des paroles des chansons, chansons qui sont parfois encore plus sombres que la couverture même. Avec Deion’s House, la seule produite en grande partie par Will Sessions, l’histoire débute et nous rencontrons un jeune glandeur, un peu voyou sur les bords, sans doute pas méchant mais aux habits qui empestent l’herbe et qui se trouve obligé d’attendre chez Déon afin que son ami Sonny — dont les parents, ultra-religieux, tentent de protéger de toutes les influences empoisonnées qui grouillent les rues — sorte de chez lui afin de le rejoindre. La minutie des détails de cette chanson ne peuvent qu’emporter l’auditeur dans le monde des interrogations et du doute quant à la part de réalité et d’inventivité artistique qui prend place dans les mots choisis. Peut-on en effet s’attendre à la même candeur exprimée auparavant dans Distortion (Album of the Year), la chanson qui retraçait les évènements qui avaient eu un impact important sur le rappeur durant l’année 2009 — ou Black Milk se

Le personnage principal de No Poison, No Paradise est donc un gamin du nom de Sonny, dont l’histoire est en grande partie influencée par la vie de Black Milk et, en plus petite partie, par la vie des nombreuses personnes dont le chemin a traversé celui de l’artiste à un moment ou à un autre de son parcours. En tous cas, c’est ce qu’il affirme. L’histoire débute avec la deuxième chanson de l’album et finit avec la dernière. Elle reçoit une fin appropriée avec Poison, une chanson bonus disponible sur iTunes, dont la construction judicieuse des mots permet à l’artiste de lancer une série de clins d’oeil aux divers thèmes abordés par les autres titres de l’album.

Au fur et à mesure que les chansons se succèdent, l’histoire se révèle être un profond rêve dans lequel Sonny voit se succéder des images du passé et du présent, d’erreurs et de succès — des images de sa vie, en somme. Les paroles donnent l’impression d’avoir été façonnées avec un soin particulier, et l’on se rend compte que le rappeur ne rigolait pas lorsqu’il disait travailler quotidiennement sur sa musique jusqu’à pas d’heure. Lorsque c’est au tour de Sonny’s dreams de sortir ses notes, on sent que le producteur reprend la place qui est sienne. Sur cette chanson où apparaissent des gagnants du Grammy tels que Dwele et Robert Glasper Jr., l’auditeur est embarqué dans un voyage empli de subtilités musicales qui le laisseront dans un état second… Jusqu’à ce que Sonny soit forcé de se réveiller et que la chanson, qui regorge de sample de gospel et d’une qualité de sample vocaux à la Black Milk nous rappelle avec sourire les jours de Popular Demand. Des chansons parsemées de soul qui permirent au jeune Curtis de se retrouver dans la proximité de génies de l’acabit de Slum Village et J Dilla. Et c’est alors qu’apparaît une autre touche d’innovation, au moment même où dimanche finit et laisse place à lundi et qu’une nouvelle façon de concevoir le break sur un beat Hip-Hop s’affirme comme une nouvelle arme dans l’arsenal musical du style de Black Milk. Puritan Ave, avec son break qui sample du jazz fusion ne fait que le confirmer : s’il fallait trouver un album qui représente l’avènement de Black Milk, il s’agirait de No Poison, No Paradise. Ceux qui parurent auparavant ne furent que des apéritifs, car le jeune producteur peaufinait encore le type de son qu’il considérerait sien : non pas aussi inspiré par la soul comme sur Popular Demand, ni aussi électronique que sur Tronic, moins conflictuel que sur Synth or Soul, mais bien mieux poli et travaillé qu’auparavant, No Poison est la nouvelle carte de visite de Black Milk.

 

 

 
 
  

Give me the hi-hat groove

—— Black Milk, Try

Black Milk live at VK*, Brussels — 26.11.2013
 
 

black milk

Black Milk s’est assigné comme but de parvenir à produire le type de musique capable d’affecter considérablement les oreilles des personnes qu’elle atteint. De la musique que l’on écouterait au fil des années, que l’on redécouvrirait avec chaque nouvelle décade et que l’on parviendrait, finalement , à apprécier à nouveau. A apprécier différemment. De la musique pure. De là à savoir si le jeune rappeur a atteint son objectif, d’aucuns ne pourront faire autre chose que réfléchir vaguement. Mais personne ne serait capable de renier la maturation de l’homme qui nous a offert Sound of the City, en 2005. Encore davantage après avoir assisté à une de ses performances live, comme il m’en a été donné la chance lors de son dixième arrêt dans son grand tour d’Europe, accompagné de son groupe Nat Turner (dont les membres sont Ab, Malik Hunter et Zeb Horton).

 

Moins d’un mois auparavant, la salle du Vk* avait été honorée par la présence de Madlib, également connu en tant que Lord Quas, le Beat Kondukta ou encore le Bad Kid. Il s’était mis en tête de créer un DJ set de pure magie — et y était parvenu. Mais cela ne m’avait en aucun cas apprêté à l’expérience prestée par Nat Turner, encore une fois. En effet, j’avais déjà eu l’occasion de les voir sur scène avec Black Milk durant un festival, quelque part en Allemagne, il y a quelques années… A ce moment, ils parcouraient l’Europe pour présenter Album of the Year, le pénultième album de Curtis. Déjà en cet instant, j’avais pu sentir les moindres tréfonds de mon âme se remuer et s’agiter au rythme de leurs instruments. Ces souvenirs me berçaient pendant qu’Ab en profitait pour faire irruption sur scène, toujours plongée dans la pénombre, en prenant place face à son clavier Roland X7, rapidement rejoint par Malik Hunter qui prit sa guitare basse encore plus silencieusement que son partenaire tout en regardant Zeb Horton — enfin parvenu à se frayer un chemin à travers son kit de batterie — et le DJ prendre leurs places respectives.

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Aussitôt que les premières notes de la guitare de Malik se hissèrent sur les ondes, la foule, toujours aussi timidement élusive en début de concert, prit place en masse et Black Milk apparut sur la plateforme, juste à temps pour donner au concert le sens qui paraissait lui manquer. Car il s’agissait après tout d’une performance, et que toute performance nécessite un bon conducteur. En effet, sans son apport, lyrique notamment, il aurait été bien ardu de reconnaître les chansons jouées avec l’interprétation de haute volée qu’apposait Nat Turner dès le tout début du concert, illustrée par un Keep going dont seules les paroles le rappelaient aux mémoires.

Ils ne s’arrêtèrent pas là et improvisèrent à nouveau sur Welcome (Gotta go) et Try, chansons phares des albums — respectivement — Album of the Year et Tronic. D’une façon pas si différente que cela d’Oddisee, qui s’est également produit à Bruxelles il y a quelques semaines, Black Milk avec Nat Turner offrit à son public une performance musicale à laquelle on n’assiste que sporadiquement dans l’arène de la musique Hip-Hop, en ce que sur chaque musicien pèse une tâche essentielle dans l’ensemble et que seule ses capacités et virtuosités personnelles lui permettront de hisser l’entièreté du groupe dans des sphères rarement atteintes lors d’un concert live.

black milk 3

Car avec Black Milk et Nat Turner, il faut aborder les termes “groupe” ou “formation” de la même façon que lorsqu’on les associe à d’autres styles tels que le rock ou le jazz. Effectivement, après avoir assisté à la dynamique qu’ils partagent sur scène, il n’y avait peu de doutes à porter au fait qu’ils se connaissaient et jouaient ensemble depuis la nuit des temps. L’alchimie qu’ils partageaient m’ont fait me demander si l’expérience pouvait ressembler à celle de The Roots live. Cette alchimie était visible et clairement palpable lorsque Zeb Horton se mit à reproduire exactement la succession de sons de batterie qui lui était indiquée par le conducteur, Black Milk, sur une improvisation de Bounce, une autre chanson de Tronic.

Elle l’était également lorsque Black Milk se mit subrepticement à l’arrière de la scène afin de laisser un espace raisonnable pour que Malik Hunter et Ab détruisent le breakbeat comme il se devait. Et non sans surprise, mon corps se mit à la ressentir également, alors qu’il se bougeait à l’unisson de chacun des coups de la batterie de Horton, qui me firent rapidement penser à ceux qu’aurait pu donner un gorille en pareille situation — s’il venait jamais à quelqu’un l’idée d’offrir un kit de batterie à un gorille. La réalisation d’être témoin d’un évènement unique semblait partagée par tous; en tous cas, je choisis de le déduire du sentiment de calme bonheur qui semblait avoir un peu attrapé le public dans son entièreté, y compris cette jeune fille qui n’avait jamais entendu parler de Black Milk auparavant et que j’étais parvenu à emporter pour la route.

Et quelle route ce fut. Je ne pourrais honnêtement estimer le temps que dura le concert, malgré le fait que je m’étais retrouvé à noter frénétiquement les noms de toutes les chansons que je parvenais à reconnaître malgré la myriade de disparités apportée par les ré-interprétations du groupe. Je me souviens toujours des dernières chansons jouées, de Deadly Medley et de Losing Out, de Distortion et de The Matrix. De Ring the Alarm. Il est très probable que je m’en souvienne particulièrement bien en raison du fait qu’il s’était agi de l’encore le plus long auquel il m’ait été donné d’assister. Sans doute le plus jouissif également, auprès d’un public ressuscité. Alors que le show se terminait, mes oreilles bourdonnaient encore pendant que j’engloutissais la dernière bière qui traînait. Mon esprit était toujours perché sur un nuage, sans doute propulsé là-haut par la musique, sans doute ne reviendrait-il pas; je n’en pris cure cela-dit et traînait mes pas à travers un long corridor qui mena à un deuxième long corridor qui me mena lui-même à un petit escalier. Au bout du tunnel, une pièce de taille modeste et, à l’intérieur, probablement à m’attendre : l’artiste.

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Afin de savoir ce qui m’a valu ma présence dans cette loge et le but de celle-ci, rendez-vous ici-même très prochainement !

 
——— version française écrite par Huru pour Beatchronic ; interview réalisée par Beatchronic, Da Bluefunk et Huru.